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Quel est ce produit et pourquoi l’utiliser dans l’aquarium ?
Un aquarium est un système fermé sensé reproduire les conditions de vie des poissons que nous admirons. C’est loin d’être l’Amazone.
Malgré des renouvellements d’eau réguliers, une filtration appropriée, des soins intensifs, il est inévitable que des « polluants » s’accumulent dans cette cage de verre.
Ces polluants contiennent à eux tous la majorité des éléments présents dans la nature, tant minéraux qu’organiques.
Dans la nature, ces polluants sont nécessairement moins concentrés et, surtout, ils sont assez vite recyclés. « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » en avait conclu Lavoisier, le premier scientifique ayant mis en évidence la présence de l’oxygène dans l’air que nous respirons.
Les polluants sont, dans des conditions habituelles, oxydés, transformés en corps simples et retournent dans le cycle du vivant.
Cette oxydation n’est pas toujours possible en aquarium: qui dit « oxydation » dit « oxygène » et le processus peut déboucher sur une déplétion plus ou moins grave de l’eau en oxygène.
potentiel redox
Qu’on ne s’affole pas à la vue de cette expression que chacun d’entre nous à entendue, en se disant que seul un prix Nobel de chimie pourrait s’y retrouver.
Pour faire très simple, disons qu’il existe un lien direct entre le potentiel Rédox et la quantité d’oxygène dissous dans l’eau. Plus l’eau d’un aquarium est riche en oxygène, plus le milieu est oxydant.
Moins elle en contient, et plus le milieu est réducteur. Deux gaz ont un caractère unique: l’oxygène est un oxydant, l’hydrogène un réducteur.
Cette histoire ne nous regarde pas: il s’agit d’un échange amiable d’électrons auquel nous ne pouvons rien, comme bien souvent lors de phénomènes naturels.
Il est malheureusement souvent difficile de garder un potentiel Rédox convenable: l’oxygène que nous apportons à l’aquarium, de quelque manière que ce soit, voit sa concentration diminuer, et il nous faut bien souvent nous contenter de teneurs assez faibles en oxygène (lorsqu’on à 5-6 mg/l à 25°C, il n’y a pas lieu de se plaindre.)
Où va cet oxygène dissous ? Une bonne partie est consommée par les animaux « supérieurs », une autre partie par les bactéries nitrifiantes. Le reste va être consommé par toute une chaîne de décomposeurs, de plus en plus petits.
La présence de déchets (visibles ou non) est toujours synonyme de réduction ou d’oxydation. Dans nos aquariums, de nombreuses molécules (trop petites pour être récoltées avec une passoire) sont donc consommatrices d’oxygène (la réduction étant à éviter à tout prix.)
Il serait injuste de négliger les phénomènes qui font intervenir des molécules autres qu’organiques: les mêmes processus d’oxydation transforment les minéraux et nul n’ignore que le fer « rouille ».
Ceci n’est qu’un exemple parmi des dizaines qui se déroulent dans l’aquarium.
L’accumulation de déchets non « recyclés » se traduit par une couleur indésirable de l’eau (voire une odeur !) Les poissons survivent plus qu’ils ne vivent et, bien souvent, la seule solution que trouve l’aquarium pour se sortir de cette situation est l’eutrophisation pure et simple: des algues se développent grâce aux polluants, meurent en consommant les derniers milligrammes d’oxygène disponibles.
En conclusion, maintenir un haut potentiel rédox dans un aquarium est désirable, mais pas toujours évident. Nous nous servirons donc d’une source d’oxygène extérieure à l’aquarium.
Les oxydants
Il en existe plusieurs, et, comme il se doit, tous ont été essayés en aquariophilie:
- L’ozone (O3) a eu ses heures de gloire, jusqu’à ce que les aquariophiles s’aperçoivent que leurs fils électriques perdaient petit à petit leur protection en matière plastique. Il semble revenir, surtout en eau de mer. Les moyens de production archaïques se sont modernisés et surtout, la quantité introduite dans l’aquarium est maintenant mesurable avec précision. C’est un très bon auxilliaire de l’écumeur, dans lequel il est parfois directement introduit.
- Le peroxyde d’hydrogène (H2O2 ou « eau oxygénée ») peut également être utilisé. Son principal défaut étant son instabilité: il se décompose très rapidement en présence de la plus grande partie des métaux qui jouent un rôle de catalyseurs. Toutefois, des appareils peuvent distribuer des quantités précises et régulières. Après tout, pourquoi pas ? Il semble néanmoins que ce genre d’appareil soit quelque peu gourmand en recharges, elles-mêmes gourmandes en monnaie.
- Le permanganate de potassium (KMnO4) convient parfaitement à un usage aquariophile, sa durée d’action dans l’eau étant bien plus prolongée que celle de l’eau oxygénée. Régulièrement, j’effectue donc ce traitement (une fois par semaine me semble un minimum si on respecte les recommandations ci-après):
Je dissous 1 gramme de permanganate dans un litre d’eau, ce qui nous donne une concentration de 1 pour mille (1 g pour mille millilitres, soit 1 mg/ml.) Ceci, pour ne pas me fatiguer à effectuer des calculs trop compliqués.
Pour garder une bonne marge de sécurité, chaque traitement est limité à 0,25 mg par litre de l’aquarium (1 mg pour 4 litres).
Il suffit donc de mesurer ou d’estimer la capacité nette de son aquarium et de diviser le nombre de litres obtenus par 4 pour obtenir la quantité de KMnO4 à utiliser (pour un aquarium de 200 litres nets >>> 50 ml.) On évitera qu’il se forme une couleur violette dans l’aquarium.
Pour cela, verser le produit à petites doses dans le courant d’une pompe.
L’eau prend alors une couleur légèrement jaunâtre et, en observant attentivement, on peut voir de fines particules ocres en suspension.
Lors des premiers traitement, il est possible que l’eau demande un ou deux jours pour retrouver sa clareté. Le filtre risque de s’encrasser très rapidement.
L’eau devient d’une limpidité cristalline, à tel point que sa surface se transforme en miroir.
Ayant conseillé ce traitement à des aquariophiles victimes d’une invasion de cyanobactéries (eau verte), ceux-ci m’ont rapporté que le problème était résolu en moins d’une semaine.
Autre fait remarquable: il arrive bien souvent que les poissons pondent le lendemain ou le surlendemain du traitement. Il y a plusieurs explications possibles: oxydation de phéromones de « stress » ou élévation de la teneur en oxygène de l’eau ? De plus, les matières organiques présentent dans l’aquarium tendent par la suite à former des flocs très lourds et compacts et donc faciles à siphonner.
Je ne pense pas qu’aux concentrations employées, le permanganate puisse avoir un effet bactéricide ou fongicide.
Je n’ai, pour ma part, jamais noté d’effet indésirable sur les poissons ou les escargots. La seule précaution à prendre est de ne pas laisser se former un nuage violet qui pourrait irriter les branchies des poissons.
Aux valeurs de pH de nos aquariums, le permanganate est réduit à l’état de bioxyde de manganèse (MnO2) insoluble. L’ammoniaque est lentement oxydé par le permanganate pour donner des nitrites et nitrates.
Il oxyde également les chlorures en donnant du chlore gazeux, du bioxyde de manganèse, de l’eau et du chlorure de potassium. De même, il oxyde les cyanures à des pH supérieurs à 5.
Enfin, tous les effets du permanganate n’ont pas fait l’objet d’études et certaines réactions sont encore mal connues. L’abattement du Carbone Organique Total (COT) est cependant démontré.
Je ne saurais insister sur cette propriété: des aquariophiles se plaignent régulièrement d’invasions d’algues (cyanobactéries également) alors que les concentrations en nitrates et phosphates de leur eau soient « indétectables ».
A quand un test pour mesurer la concentration en Carbone Organique Dissous à la portée de l’aquariophile ?
Comme il se doit, lors de l’usage de tel ou tel procédé, il y a les « pour » et les « contre », les inconditionnels et les opposants irréductibles. Je reviens d’un site consacré à l’aquarium récifal. Le permanganate a été essayé, pour augmenter le potentiel rédox de l’eau.
Certains ont même voulu l’augmenter considérablement, en préparant une solution à 10% (10 g de KMnO4 par litre d’eau) et en l’utilisant tous les jours.
Elles sont agaçantes, ces cyanos rouges qui tapissent tout, les acteurs et le décor. Rideau ! Il n’y a plus rien à voir ! Ces « aquariophiles » ont eu des problèmes avec leur coraux, mais quand on emploie un produit à des concentrations 10 fois supérieures à ce qu’elles devraient être, quoi d’étonnant.
Ils en ont déduit que les produits du commerce étaient beaucoup plus efficace: le REDOX +, Le ANTI-RED (ainsi appelé parce qu’il combat les cyanos rouges en eau de mer) sont nettement plus efficaces. Un petit problème cependant: le REDOX + est… du permanganate de potassium (très cher.)
Dans l’usage de n’importe quel produit, le plus est souvent l’ennemi du bien. Je déconseille donc de telles concentrations. En revanche, rien n’interdit de préparer une solution à 0,5 g /l et d’utiliser ce produit journellement.
Je pense néanmoins que ce produit est à réserver pour les « grandes occasions » et que jamais rien ne pourra remplacer les travaux d’entretien minimums à effectuer sur un aquarium (particulièrement les siphonnages du sol et les lavages de filtres.) Seuls quelques aquariophiles, plus amateurs de bacs joliment plantés que de poissons peuvent à la rigueur s’en dispenser: ces bacs sont des jardins aquatiques où l’animal ne joue qu’un rôle accessoire. La pollution carbonée n’existe pratiquement pas.
J’espère que l’utilisation du permanganate, aussi vieille que l’aquariophilie, dit-on, saura vous convaincre qu’il ne faut pas baisser les bras devant l’adversité et qu’elle fera comprendre aux plus novices d’entre nous que, sans une bonne hygiène, bien comprise, un aquarium n’est pas viable. Qu’à contrario, un aquarium régulièrement entretenu n’est pas un objet de corvées quotidiennes ou hebdomadaires.